Pas d’Oc sans les Troubadours !

EO1Troubadour

Dédicace à Carole Delga (1) e als conselhers regionals.
Texte écrit en 1996 à destination de Marc Censi, alors Président de la Région Midi-Pyrénées. Son dezir d’Occitanie centrale voyait juste. 🙂

 Contrairement aux idées reçues, et elles ont la vie dure, la langue et la culture occitanes ne se résument pas dans une terminaison dite régionale, adjectif réducteur et impropre pour définir la portée universelle d’une civilisation qui pris naissance, au début du XII è siècle, sur un territoire qui équivaut au tiers du territoire français d’aujourd’hui. « Quantitativement, les Troubadours représentent un des moments les plus considérables de l’histoire de la poésie mondiale, la plus forte concentration dans le temps et dans la géographie. Là, en environ un siècle et demi, se révèlent près de cinq cent poètes dont aucun n’est indifférent. Parmi eux, plus de cent vingt sont désignés comme digne de son anthologie fondamentale par le grand médiéviste Martin de Riquer, et une bonne trentaine s’égalent aux sommets du patrimoine de l’humanité. » (2)
Unique cette culture qui doit à ses origines de n’avoir pas suscité une volonté nationale. L’eut-elle fait, elle aurait sacrifié la surprenante grandeur de son expérience originale et son message particulier : elle a atteint à l’universalité par de tout autres voix. Aucune nation ne parle dans la poésie des Troubadours. Elle en est l’antithèse, une poésie de l’humain, qui est un appel à l’individu, à sa créativité.
Le cadre est posé définitivement. Force est de constater qu’aujourd’hui si l’Occitan est toujours étudié, comme langue romane, dans plus de 80 universités dans le monde, c’est uniquement parce qu’il y a eu les Troubadours. Paradoxalement, c’est dans la langue française que leur influence fut la plus faible. A part quelques trouvères tardifs comme Conon de Béthune ou Thibaud de Champagne, aucun ne tient la comparaison.
Par contre en Allemagne, au début du XIII è siècle, le « Minnesäng » ne se serait pas constitué, à côté de l’épopée héroïque de tradition germanique et du roman d’origine celtique, sans l’exemple des Troubadours. Il faudra attendre ensuite quatre siècles et l’époque baroque pour que la poésie allemande connaisse une nouvelle explosion.
En Angleterre, alors traversée par des conflits de langues (on s’y exprime surtout en langue d’Oïl ) la reine Aliénor, duchesse d’Aquitaine, y reçoit les Troubadours, tel Bernat de Ventadorn, et son propre fils Richard Cœur de Lion chante directement en occitan.
En Italie, après avoir écrit en « langue d’oc », tel Dante et Pétrarque, les poètes transposèrent les thèmes en langue du « si », mais c’est en Espagne que la tradition troubadouresque s’est le mieux maintenue, notamment en Galice et au Portugal, par lequel elle se transmit plus tard jusqu’au Brésil. En Catalogne elle s’est normalement conservée jusqu’au XVè siècle avec Jordi de St Jordi et Auzias March.

Voilà, à l’heure de l’Europe et de sa pluralité culturelle, il serait grand temps de révéler ce pays sans nom, que nous nommons aujourd’hui Occitanie, comme un creux que les historiens ont du mal à percevoir avec leurs lunettes réfringentes. Si on l’envisage avec d’autres yeux, on y voit un plein, le lieu des échanges les plus féconds pour notre avenir même. Ici, le rôle des Régions (4 d’entre-elles sont de culture occitane) doit être prépondérant !

 

Témoignent :

Laura REGINA, Ricercatore di Filologia romanza presso la Facoltà di Scienze delle Formazione, Università di PALERMO.
« Dedico una parte del Corso di FILOLOGIA romanza per gli studenti di Comunicazione Internazionale all’occitano, quale lingua romanza che per prima ha prodotto testi letterari. Presento testi didattico-cortesi medievali: di uno di essi, 
L’Ensegnamen alla dama di Garin Lo Brun, ho curato un’edizione critica (Archivio Guido Izzi, Roma 1996). Mi occupo quindi di occitano antico. »

Peter CICHON, professeur de langue occitane à l’Institut d’Etudes romanes à l’Université de Vienne, en Autriche.
« Cada an ai entre 5 e 10 estudiants que venon participar e que al fin del cors partisson ambe una certana coneissença de l´istòria de la lenga e la cultura, de sa literatura (anciana e moderna) e sabon manténer una conversación pas tròp complicada dins la lenga.
Amicalament »

Lucia LAZZERINI professeur de Philologie romane à l’Université de Florence (Italie).
« Mes cours sur les troubadours et la littérature occitane médiévale sont fort appréciés par mes étudiants (à peu près, chaque année, 50). Ils comprennent très bien que dans la lyrique des troubadours plonge ses racines toute la poésie de l’Occident, et ils aiment beaucoup ce chant d’amour un peu mystérieux, dont la pluralité de significations possibles augmente le charme, comme j’ai dit dans ma « Letteratura medievale in lingua d’oc », Modena, Mucchi, 2001. Maintenant je suis en train de préparer un cours sur Frédéric Mistral et son poème « Calendau.
Bien cordialement. »

 

(1) Préside la new Région Occitanie.

(2) Félix-Marcel Castan, ‘Jeunesse des Troubadours’ (Editions Cocagne)

 

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